Création du monde
Il y a fort longtemps du vide surgirent deux natures différents : la matière et Bĕlios. La matière existe. C'est son seul attribut. Seule, elle n'est que désordre et chaos et toujours tend vers cet état. Seul Bĕlios EST, c'est à dire qu'il constitue l'essence du monde (si bien que décrire la matière en terme d'essence par l'emploi du verbe correspondant est par là-même reconnaître l'existence implicite du Dieu... navré, cher oncle, mais notre langue même est parfois un obstacle à l'appréhension des mystères). Belios est en lutte constante non seulement pour maintenir l'ordre qu'Il mit en place et qui sous-tend l'univers tel que nous le dévoilent nos sens limités, mais encore pour l'améliorer et l'harmoniser. Que ce Grand Labeur cesse, et la matière retournera inéluctablement vers son état primitif informe. Il faut donc voir derrière tout ce qui est la présence de Bĕlios, en particulier tout ce qui avance et se transforme. Bĕlios est mouvement et énergie, « Père de la Vie ».
Les Hommes et races douées de raison
Les efforts éternels de Bĕlios pour donner essence à l'existence ont conduit bientôt à l'apparition d'un troisième état : la CONSCIENCE, synthèse d'essence et de matière tout en demeurant liée à la première. Nous possédons vous et moi cet attribut, de même que tout individu en mesure d'user du verbe « être » pour se décrire ou décrire son environnement. Autrement dit, non seulement Bĕlios nous a accordé le fait d'être, mais encore le fait d'être conscient. Ce n'est pas le cas des animaux : ces derniers ne peuvent que suivre et subir la Grande Oeuvre tandis que les hommes se doivent de poursuivre le Grand Labeur. Cet état de conscience a émergé de par les efforts de Bĕlios, comme l'eau surgit d'une fontaine sous l'effet de la pression - certains y voient d'ailleurs l'origine du symbole du Dieu, tandis que le nom de « Bĕlios » serait issu d'une antique civilisation gagnée à la religion et qui nommait ainsi son Dieu tutélaire. Celui-ci aurait été conservé par la suite pour gagner à la cause les masses avides d'images frappantes et retorses aux concepts fondamentaux-. Cependant, cette même conscience capable de donner sens au monde à l'instar du Dieu est également en mesure de s'en émanciper. Il s'en suit qu'existent des individus voire des communautés entières susceptibles de contrarier voire de s'opposer au Grand Labeur en favorisant sciemment ou non le désordre et l'anarchie. En effet, de même que la matière fut ordonnée et légiférée par Bĕlios, de même le Dieu œuvre à ordonner et légiférer progressivement les communautés humaines, dynamique qui est historiquement démontré par ailleurs. C'est pourquoi Bĕlios est souvent qualifié par ses adeptes de « Père des civilisations ».
Ordre de Bělios
Il s'en suit, compte tenu de la relative indépendance de la conscience vis à vis du Grand Labeur, qu'il est nécessaire que le Dieu dispose de relais doués de raison. C'est la justification de l'Ordre dont une compagnie fit halte sous vos murs. Ces derniers n'ont de cesse de parcourir aussi bien les allées des palais que la campagne, ce qui les met fréquemment aux prises avec des communautés réticentes, voire hostiles et farouchement indépendantes, et il est fréquent qu'alors l'Ordre laisse parler les armes et les force à l'intégration -ou l' « harmonisation » aiment-ils déclarer-. Ce battage régulier en fait une organisation aux réseaux étendus auxquels les princes de ce monde prête l'oreille. L'ordre échange avec eux de bonne grâce, espérant ainsi augmenter son influence et leur faire nouer d'avantageuses alliances, premiers pas vers la constitution d'un empire global et indivisible à la gloire de Bĕlios, but ultime, sur lequel pourra se reposer le Dieu afin de parfaire encore la Grande Œuvre. « Une Loi pour la Nature, Une Terre pour les Consciences » aiment-ils résumer. Je ne serai guère étonné par ailleurs d'apprendre que l'Ordre ait dépêché sans tarder une mission vers cette île baptisée Kandorya dont vous avez sûrement entendu la récente découverte. Il est à noter que l'Ordre ne se préoccupe pas tant de politique que de ses conséquences. L'organisation n'a pas la prétention de connaître les desseins de Bĕlios et la forme qu'il désire donner à la civilisation. Seule est importante la progression croissante de cette dernière vers la simplification, l'unité et l'harmonie. Il est fréquent de voir l'Ordre désavouer voire combattre un allié de longue date -c'est à dire l'une des Consciences Harmonieuses dont il sera traité plus loin- car celui-ci a changé de politique par ambition personnelle ou se montre tout simplement incapable d'atteindre le palier supérieur. Le mot d'Ordre est « ralliement », non à leur drapeau mais à celui, inspiré par Bĕlios, qu'ils auront jugé le plus digne de leur soutien.
Bělios et la mort
Le feu, auquel le Dieu est attaché lors des enseignements, détruit le bois et durcit la poterie, et il serait vulgaire de croire que la mort est contraire aux efforts de Bĕlios : vie et mort sont liées dans une dynamique de destruction-création. La mort n'est pas une perte d'essence, mais un changement d'essence, l'existence ne subissant aucune altération bien entendu. Bĕlios, essence des essences, en joue dans son Grand Labeur. « Tuer » et « Rendre à Bĕlios » sont des expressions parfaitement interchangeables pour les adeptes. Lors de toute condamnation, l'Ordre rend ainsi justice par le feu, moyen symbolique et direct de le signifier. Par ailleurs, la conscience, en ceci qu'elle est une particularité exceptionnelle de l'essence mise en forme par Bĕlios, disparaît à la mort. Il arrive cependant que le Dieu accorde à certaines consciences exceptionnelles, ou dans des circonstances exceptionnelles, de conserver leur essence tout en perdant leur forme d'existence. L'individu concerné peut alors servir Ses desseins par delà la mort. Il en est ainsi de ce que le vulgaire nomme « fantôme », « spectres », etc : la conscience concernée est alors à l'origine – où a été la victime- de circonstances contraires au Grand Labeur et condamnée à corriger la situation ou, si elle ne le peut, à errer pour une raison que seul Bĕlios connaît. C'est aussi le cas des membres les plus zélés et sincères de l'Ordre qui sont alors respectueusement nommés « esprits ». On décrit à l'occasion certaines conversations que les dirigeants du culte auraient eu avec leurs sages prédécesseurs lors d'occasions décisives et exceptionnelles. Avoir prêter de bonne foi serment à Bĕlios -c'est à dire voir son nom écrit dans le « Registre des Consciences Harmonieuses» sur lequel tout archiviste veille comme à la prunelle de ses yeux- et lui prêter main forte, a fortiori être membre de l'Ordre, est un premier pas vers l'essence éternelle, ou âme, support de l'esprit. Ceci n'est pas devenir sujet de l'Ordre, mais allié dans ce projet commun qu'est le Grand Labeur. Une conscience harmonieuse peut demander asile et justice à l'Ordre. L'Ordre se réserve la possibilité quant à lui de faire appel à elle lorsque les circonstances l'exige. Les essences éternelles se manifestent le plus couramment lors du sommeil de celui à qui elles souhaitent s'adresser en lui suggérant des images, des idées, des situations. « La nuit porte conseil » est l'expression généralement employée lorsqu'une telle visite est désirée. Elle ne peut être cependant à l'initiative du récepteur. Prendre la décision de convoquer une âme est en effet un acte extrêmement grave : une prétention à considérer comme sujette une conscience supérieure distinguée par Bĕlios et très vraisemblablement meilleure que la sienne. De telles convocations sont ardemment et longuement débattues par les autorités suprêmes de l'Ordre et ne sont de toute manière entreprises que lors de situation de crises politiques, militaires ou sociales gravissimes, lorsque les grands recteurs se jugent incapables de consensus et ne voient d'autres choix que celui de solliciter l'avis extérieur éclairé et impartial d'un esprit.
La magie
La raison d'être des consciences est de poursuivre la Grande Oeuvre. Certaines ont reçu à cet effet la capacité exceptionnelle d'être en mesure, à l'instar de Bĕlios, de manipuler l'essence. Bien que l'étendu de ce talent ne soit rien en comparaison du pouvoir de Bĕlios, les possibilités qu'il ouvre vont de pair avec une écrasante responsabilité dans la poursuite du Grand Œuvre. L'Ordre, déjà sourcilleux vis à vis du commun, juge avec attention et sévérité les actes de ces dépositaires. Il n'y a pire hérétique que celui qui utilise sa capacité à manipuler l'essence pour travailler non seulement la matière mais encore la conscience, s'arrogeant le pouvoir divin de distinguer ceux qui peuvent durer de ceux qui doivent passer. Ainsi en est-il des nécromants.